Lors de la manifestation parisienne de ce 8 mars à Paris, le collectif « Nous Vivrons », qui lutte contre l’antisémitisme et marchait au nom des femmes victimes du Hamas lors de l’attaque du 7 octobre, a été victime de projectiles et d’insultes, au point de devoir être exfiltré par la police. Sarah Aizenman, porte-parole du collectif, revient pour « Marianne » sur ces événements.
À Paris, la manifestation féministe du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, devait être un rassemblement symbolique de l’unité des femmes du monde entier. Sauf que le collectif « Nous Vivrons », qui lutte contre l’antisémitisme et marchait au nom des femmes victimes du Hamas le 7 octobre 2023, a vite découvert qu’il n’était pas le bienvenu.
Plusieurs vidéos qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrent d’autres manifestantes adresser des insultes aux membres du collectif, qui a finalement dû être exfiltré après avoir été victime de projectiles. Sarah Aizenman, porte-parole de « Nous Vivrons », revient pour Marianne sur ces événements.
Marianne : Comment définiriez-vous ce que défend votre collectif ? Et pourquoi défiler aux côtés des organisations féministes ?
Sarah Aizenman :Notre combat, c’est la lutte contre l’antisémitisme. Partout où il surgira, on sera là, on ne veut plus se taire. On souhaite défendre nos valeurs, porter haut et fort nos combats et ne pas le faire cachées, mais reprendre la place qui est la nôtre. C’est la même que tous les Français, on en a marre de devoir organiser des événements en marge quand on est juifs. On avait à cœur de participer à cette grève féministe, de rejoindre leur combat et que les féministes rejoignent le nôtre. Solidarité avec les femmes du monde entier, cela inclut les femmes israéliennes. C’est ce qui a été décrié. Plusieurs associations, collectifs et sections locales ont condamné les organisatrices et notre participation. On y est allées tout de même.
Comment s’est déroulée la manifestation ?
On y est allées avec nos pancartes et les photos des otages. On a fait le choix de ne pas brandir de drapeaux israéliens, même si cela aurait été naturel : les Ukrainiennes défilent avec leur drapeau, les Iraniennes et les Palestiniennes aussi. On savait que cela pouvait susciter de l’animosité et mettre tout le monde en danger. On y est allé dans une démarche pacifiste, on voulait que ce soit un symbole historique.
Dès le début, on a connu du harcèlement de la part de manifestants, ils ont essayé de couvrir nos slogans avec les leurs, par exemple « Sionistes, fascistes, c’est vous les terroristes ». Heureusement qu’on avait notre service d’ordre, cela aurait fini en pogrom de juives en plein milieu de Paris. Ils sont devenus de plus en plus pressants et ont jeté des œufs, des projectiles. La police nous a exfiltrées, et après que ça se soit calmé, on nous a proposé de revenir, mais en queue de cortège. Ce qu’on a refusé, parce que les militantes étaient terrorisées et pour le symbole : on a le droit de faire partie du cortège.
Une vidéo largement relayée sur X associe votre service d’ordre à la Ligue de défense juive (LDJ), un mouvement sioniste d’extrême droite. Était-ce le cas ?
C’est trop facile, c’est l’épouvantail. Dès que notre service d’ordre fait un pas, on dit que c’est l’extrême droite. C’est de l’antisémitisme. À aucun moment la LDJ n’était présente. Notre service d’ordre était constitué du Service de protection de la communauté juive, qui est formé pour alerter la police en cas de menace terroriste antisémite. Il n’y avait absolument aucune trace de la LDJ. Et nous n’avons jamais été au contact, à quel moment peut-on imaginer que des femmes juives viennent se battre et s’entourent de membres de la LDJ ? Il y a assez de meurtres antisémites de grands-mères pour que nous ne nous mettions pas en danger.
Vous estimiez avoir votre place au sein du cortège ?
Bien sûr. Je ne dis pas que les débats n’ont pas été houleux, mais au lendemain du 25 novembre [ce jour-là, le collectif « Nous vivrons » était venu dénoncer le « silence assourdissant » des associations sur les violences sexuelles commises sur des Israéliennes par le Hamas], il y a eu une main tendue de plusieurs organisations comme la Coordination féministe (dans un post diffusé notamment sur Instagram le jeudi 21 mars, Coordination féministe dément toutefois toute main tendue en direction de « Nous vivrons » lors du 8-Mars, soulignant par ailleurs avoir signé un texte, publié la veille, s’opposant à la venue de ce collectif dans la marche parisienne, NDLR) ou la Fondation des femmes. On a saisi cette main tendue et on a demandé à être officiellement invitées. Elles ont quelque peu tardé à répondre, il y a eu un grand débat en interne. On a notamment insisté pour venir avec notre service d’ordre, qui est unitaire, et on a bien fait, cela aurait terminé en drame.
Je retiens du positif, cela a été une avancée, et encore une fois les antisémites ont tout gâché. L’idée, c’était de parler des droits des femmes, et cela va devenir une nouvelle polémique. Ils jouent toujours à ce jeu, et quand ils sont pris à leur propre piège, ils expliquent qu’on est racistes, nationalistes, d’extrême droite. Sur quoi se basent-ils ? Est-ce qu’il y a une seule déclaration sur notre site qui laisse penser cela ?
En cas de nouvelle manifestation féministe, est-ce que vous participeriez ?
Bien sûr ! Je ne remets pas en cause les organisatrices, on verra comment elles réagissent, mais notre combat doit être porté là où ça se passe. Et là où ça se passe, c’est dans les cortèges officiels.
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